Le déploiement du vaccin contre la COVID-19 est en cours au Canada, et avec lui, il y a une augmentation des questions de la communauté de la FCANAA sur la sécurité du vaccin pour une personne atteinte d’alopécie areata. Nous avons demandé à Dr Jeffrey Donovan, dermatologue canadien et spécialiste de la perte de cheveux, de nous dire où en sont actuellement les connaissances sur la COVID-19 et l’alopécie areata.

 

Q : Puisque l’alopécie areata est une maladie auto-immune, y a-t-il une raisonde croire que les personnes atteintes d’alopécie areata ont un système immunitaire légèrement plus fort offrant ainsi une protection accrue contre le virus ?

R : Non, nous ne disposons pas de données confirmant ceci à l’heure actuelle. Rien ne permet pour l’instant de penser que les personnes atteintes d’alopécie areata seront mieux protégées contre le virus.

 

Q : Dans quelle mesure le vaccin contre la COVID-19 est-il sûr et efficace pour une personne atteinte d’alopécie areata ?

R : Nous ne connaissons pas encore la réponse précise, car le vaccin contre la COVID-19 n’a jamais été formellement étudié chez les personnes atteintes d’alopécie areata. Ce que nous savons, c’est que ces dernières contractent la COVID-19 et que, si elles sont atteintes, elles peuvent être asymptomatiques avec l’infection, être un peu malades, ou être très malades et même mourir. Ceci est clair pour nous.

En ce qui concerne les informations relatives au vaccin chez les personnes atteintes d’alopécie areata, nous n’avons pas encore toutes les réponses. Des études sont en cours pour étudier ce genre de questions plus en détail chez les personnes atteintes de maladies auto-immunes. Pour l’instant, nous n’avons pas plus d’informations. Cela ne signifie pas que les personnes atteintes d’alopécie areata ne doivent pas discuter de la possibilité de se faire vacciner avec leur médecin lorsque leur tour viendra. Cela signifie simplement qu’il y a quelques inconnues dont elles doivent être conscientes. Pour la plupart des personnes atteintes d’alopécie areata, les avantages de la vaccination l’emportent largement sur les risques.

Ce que nous avons actuellement, ce sont deux essais cliniques d’assez bonne taille pour examiner les résultats. L’un a été mené par la compagnie Pfizer et l’autre par une compagnie appelée Moderna ; ils sont donc désignés respectivement comme étant les « essais Pfizer » et « essais Moderna ».

Dans l’essai Pfizer, 43 548 participantes et participants ont reçu soit un vaccin placebo, soit le vrai vaccin. Il y a eu 8 cas de COVID-19 chez les sujets de l’essai clinique qui avaient reçu le vrai vaccin COVID-19 et 162 cas chez ceux qui avaient reçu un vaccin placebo. Cela équivaut à une protection de 95 %. L’essai Moderna a recruté plus de 30 000 participantes et participants américains, dont 7000 âgés de plus de 65 ans et 5000 de moins de 65 ans qui souffrennt de maladies chroniques à haut risque. On a observé 90 cas de COVID-19 dans le groupe placebo et cinq cas dans le groupe vacciné, soit un degré de protection similaire.

Il est important que chacun sache qu’aucun personne atteinte d’alopécie areata n’a été étudiée de manière formelle dans ces essais. Ces premiers essais cliniques ont exclu certains groupes de personnes, notamment celles atteintes de maladies auto-immunes. Nous ne connaissons donc pas la réponse précise.

Ces vaccins Pfizer et Moderna sont des types particuliers de vaccins connus sous le nom de « vaccins à ARNm ». Les vaccins à ARNm n’avaient pas encore été approuvés pour une utilisation chez les humains, c’est donc la première fois qu’ils sont utilisés. On pense généralement que l’utilisation des vaccins à ARNm contre la COVID-19 chez les personnes atteintes d’alopécie areata aura une efficacité (c’est-à-dire qu’ils obtiendront des taux de protection élevés après la vaccination) et une sécurité similaires à celles des personnes qui ne souffrent pas d’alopécie areata. Toutefois, ces études formelles doivent être réalisées. Personne n’a encore fait ces études, donc c’est un peu une supposition.

Chaque personne atteinte d’alopécie areata devra examiner les risques et les avantages avec son médecin, ainsi que ce que l’on sait des risques et des avantages au moment de la vaccination.

Le type de conseils donnés par les médecins au début de l’année 2021 sera différent du type de conseils donnés à la mi-2021, car nous disposerons de beaucoup plus de données avec le temps. Plusieurs de mes patientes et patients qui souffrent d’alopécie areata reçoivent déjà les vaccins. Bien que je surveille pour voir s’il y a des inquiétudes, les grandes études suivront également un très grand nombre de patientes et patients. Les informations dont nous disposons actuellement sont limitées, mais elles vont augmenter massivement au fil des semaines. Il n’y a aucune raison de croire actuellement que les problèmes de sécurité sont différents pour les personnes atteintes d’alopécie areata. Mais encore une fois, cela doit être étudié. Nous devons déterminer si les personnes atteintes d’alopécie areata, et dont les cheveux ont repoussé grâce à un traitement, auront une sorte de « poussée » de perte de cheveux après avoir reçu le vaccin. Pour l’instant, nous ne le savons pas, mais le risque semble assez faible.

 

Q : Dans quelle mesure le vaccin est-il sûr et efficace pour une personne participant à un essai clinique sur l’alopécie areata?

R :Il existe de nombreux essais cliniques sur l’alopécie areata dans le monde. La dernière fois que j’ai regardé, il y en avait bien plus d’une douzaine. Chaque personne qui participe à ces essais cliniques devra vérifier auprès des organisateurs de l’essai pour connaitre ce qui est actuellement recommandé en matière de vaccins contre la COVID-19.

Pour les essais cliniques, la situation est un peu plus difficile. Il est important de toujours se rappeler que nous ne savons pas vraiment comment fonctionne le médicament utilisé dans l’essai clinique, car il n’a jamais été étudié auparavant. C’est nouveau et c’est pourquoi l’essai clinique est mené. Nous ajoutons à cela un vaccin que nous savons efficace dans la population générale, mais nous ne savons pas dans quelle mesure il est efficace chez les personnes atteintes d’alopécie areata et nous ne savons pas dans quelle mesure il est efficace chez les personnes atteintes d’alopécie areata qui reçoivent ce médicament expérimental dans le cadre d’un essai clinique. Cela fait deux inconnues au lieu d’une seule.

Par conséquent, il y a beaucoup plus d’inconnues pour les personnes qui participent dans les essais cliniques. Heureusement, il n’y a probablement aucune raison de penser que, dans la plupart des essais cliniques sur l’alopécie areata, l’efficacité d’un vaccin sera réduite par la prise du médicament de l’essai. Mais ces études doivent être faites.

Tous les participantes et participants aux essais cliniques doivent simplement vérifier auprès de l’équipe chargée de l’essai. Dans de nombreux cas, les vaccins seront autorisés, mais cela doit être examiné pour chaque essai.

 

Q : Les personnes qui prennent actuellement des produits biologiques dans un essai clinique
ou qui en ont pris dans le passé, ont-elles un risque plus élevé de développer la COVID-19 étant donné les effets immunosuppresseurs de ces médicaments?

R : Parlons d’abord des médicaments immunosuppresseurs qui sont déjà utilisés dans le monde, puis nous reviendrons sur les médicaments utilisés dans les essais cliniques. Nous avons beaucoup plus de données sur les médicaments actuellement offerts en pharmacie et beaucoup moins d’informations sur les médicaments expérimentaux en cours d’essais cliniques.

À l’heure actuelle, il semble que de nombreux médicaments immunosuppresseurs sur le marché ne modifient pas tant que ça le risque de développer des formes graves de la COVID-19. La seule exception pourrait être de fortes doses de stéroïdes oraux. Pour les autres immunosuppresseurs, il semble que le risque de développer la COVID ne soit pas tellement modifié. Les personnes qui utilisent ces médicaments peuvent toujours contracter la COVID, tomber malades et mourir, mais les risques ne semblent pas différents, pour la plupart, que ceux des personnes qui n’utilisent pas ces immunosuppresseurs.

C’est une bonne nouvelle et c’est la raison pour laquelle il est conseillé à une très grande partie des personnes atteintes de maladies auto-immunes qui utilisent des médicaments immunosuppresseurs de continuer à prendre leurs médicaments pendant la pandémie de COVID-19.

Des études sont en cours, mais les données sont jusqu’à présent claires : la plupart des médicaments immunosuppresseurs ne modifient pas de manière significative le risque de contracter la COVID. Certains médicaments immunosuppresseurs sont même à l’étude pour être utilisés dans le traitement des formes graves de COVID-19 chez les patientes et patients hospitalisés (c’est-à-dire la dexaméthasone et certains types d’inhibiteurs de JAK).

En ce qui concerne les médicaments expérimentaux faisant l’objet d’essais cliniques, ces informations ne sont pas largement disponibles, mais les organisateurs des essais cliniques individuels disposent de certaines données. Les médicaments faisant l’objet d’un essai clinique sont expérimentaux et plus récents, et les informations disponibles sont donc beaucoup moins nombreuses.

 

Q : Une personne doit-elle cesser de prendre un médicament immunosuppresseur jusqu’à ce que le nombre de cas régionaux de COVID-19 diminue?

R : Chaque personne doit examiner sa situation individuelle avec son médecin. Toutefois, pour la plupart des patientes et patients, l’arrêt d’un médicament immunosuppresseur n’est pas recommandé pendant la pandémie. La plupart du temps, il sera conseillé aux personnes de continuer à prendre le médicament. D’autres mesures comme le lavage des mains, la distance physique et le port d’un masque sont fortement encouragées.